Le médiateur de l’Éducation Nationale est une instance qui peut être sollicitée en cas de désaccord avec une décision ou de conflit avec un autre agent. Il existe un médiateur par académie et un médiateur national. Chaque année, le médiateur national publie également un rapport et émet des préconisations.

De quoi s’agit-il ?
Vous contestez une décision de l’administration ou vous êtes en conflit avec un autre agent – il peut s’agir de conflits hiérarchiques aussi bien qu’interpersonnels – et vos démarches n’ont pas abouti favorablement ? Vous pouvez faire appel au médiateur.
Il reçoit, tant au niveau national qu’académique, les réclamations concernant le fonctionnement du service public de l’Éducation Nationale (de la maternelle à l’enseignement supérieur inclus) que ce soit de la part des usagers ou des personnels.
A quel moment peut-on saisir le médiateur ?
Vous devez avoir effectué une première démarche (demande d’explication ou contestation de la décision) auprès de l’établissement ou du service qui a pris la décision. Lorsque le désaccord persiste, vous pouvez faire appel au médiateur.
Attention : votre saisine du médiateur n’interrompt pas les délais pour engager une éventuelle action devant le juge administratif.
Le médiateur est un interlocuteur indépendant et impartial, qui a une bonne connaissance du système éducatif et de ses subtilités. Le recours à ce service est gratuit et la réponse est en général assez rapide.
Qui saisir ? Médiateur académique ou national ?
Si vous contestez une décision prise par un établissement (école, collège, lycée, université, etc.) ou un service relevant d’une académie (direction des services départementaux de l’éducation nationale, rectorat, Crous, etc.) ; si vous êtes en litige avec un pair ou un membre du système éducatif, vous pouvez saisir le médiateur de l’académie
Si vous contestez une décision prise par l’administration centrale du ministère (DGRH, service des pensions, etc.), le réseau des établissements français de l’étranger ou le service interacadémique des examens et concours (SIEC), vous pouvez saisir la médiatrice de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur.
Que fait le médiateur ?
Après la saisine, le médiateur étudie le dossier et donne rapidement une réponse au réclamant.
- s’il considère que l’affaire est recevable, son rôle est alors de convaincre son interlocuteur de la nécessité de faire évoluer une décision, une interprétation, de proposer une autre solution
- s’il considère que la réclamation n’est pas fondée, il va en informer le réclamant en explicitant les raisons.
Plus d’infos sur le rôle et les missions des médiateurs académiques et nationaux
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Rapport annuel du médiateur 2023
Chaque année le médiateur national publie un rapport qui dresse un état des lieux et émet des préconisations.
Sans surprise, le rapport 2023 rejoint les constats que nous ne cessons (et continuerons …) de dénoncer en instances.
Il montre une hausse continue des saisines (+ 42% en 5 ans) dans un climat scolaire de plus en plus dégradé.
Le zoom est mis notamment sur les conditions de mise en place de l’école inclusive et la montée des incivilités et violences. Conséquence : des personnels de plus en plus en souffrance…
EXTRAITS choisis :
« Les médiateurs ont fait le constat d’une recrudescence des comportements agressifs, des violences verbales ou physiques et des situations d’affrontement, non seulement entre élèves, mais aussi envers les personnels, de la part des élèves ou de leurs familles – phénomène que l’usage des réseaux sociaux contribue fortement à amplifier. Les enseignants, comme les personnels en fonction d’encadrement, se sentent mis en cause par l’ensemble de ces contestations qui s’expriment parfois de manière virulente, voire agressive, générant de l’anxiété et du découragement au sein des équipes. Ces constats peuvent plus largement être mis en perspective avec la crise d’attractivité des métiers de l’éducation – le nombre d’inscrits aux concours de l’enseignement du second degré a diminué de 30 % en 15 ans – et avec l’augmentation sensible du taux de démissions. »
« L’idéal de l’École inclusive se heurte trop souvent à la difficulté pour les équipes, et notamment les enseignants, de résoudre certains dilemmes pédagogiques, tels que la nécessité de concilier la progression collective de leur classe et l’accompagnement individualisé qu’appellent certains élèves à besoins éducatifs particuliers. Ils se disent impuissants en particulier à faire face à des élèves présentant des troubles du comportement qu’ils ne savent ni interpréter, ni gérer seuls et qui nécessitent, pour une prise en charge adaptée, des moyens, des compétences et une formation spécifiques. Dans l’incapacité d’apporter des réponses adaptées à l’enfant et satisfaisantes pour les familles, les équipes pédagogiques sont en souffrance et peuvent être tentées de sortir de leur posture professionnelle (sentiment de culpabilité ou réactions d’autorité, réponses disciplinaires, etc…), surtout lorsqu’elles n’ont pas reçu de formation spécifique. Ces difficultés concernent également d’autres personnels et particulièrement les AESH, qui ont souvent en charge plusieurs élèves aux handicaps différents, sans avoir toujours reçu une formation adaptée. De plus, les élèves qu’ils accompagnent ne sont pas nécessairement tous dans le même établissement ou la même école. Or, les AESH sont en première ligne dans la gestion de situations difficiles : ils peuvent avoir à gérer des comportements imprévisibles, déstabilisants voire violents, et sont de fait particulièrement exposés aux risques de souffrance au travail. La médiation perçoit cela notamment lors de l’instruction de saisines de parents se plaignant de leur absence, motivée par des arrêts de travail. Enfin, au-delà de l’insuffisance d’effectifs pour couvrir les besoins (malgré la création de 4 000 postes par an depuis trois ans) et des problèmes de statut et de rémunération, l’intégration des AESH à l’équipe pédagogique ne semble pas pleinement réalisée. La complémentarité et l’articulation des différents intervenants et dispositifs mis en place pour favoriser l’inclusion scolaire ne sont pas encore au rendez-vous. »
» La détérioration du climat scolaire enclenche souvent un cercle vicieux : découragement, épuisement, puis problématiques de santé et arrêts de travail. Ainsi, nombre de saisines reçues dans les académies déplorent à cet égard l’absence d’enseignants – et d’AESH – et leur non-remplacement, ou l’instabilité du remplacement mis en place. Lorsque les médiateurs analysent les demandes qui leur sont adressées, il n’est pas rare qu’ils découvrent une équipe en souffrance, qui fait état d’une situation de classe très difficile ayant provoqué l’épuisement d’un collègue, contraint dès lors à des arrêts de travail perlés. Les remplaçants, lorsqu’il est possible d’en trouver, rencontrent les mêmes difficultés et eux non plus ne résistent pas très longtemps. Les familles deviennent alors revendicatives devant le manque de continuité de l’enseignement – ou de l’accompagnement – et fragilisent un peu plus la position de la direction d’école, déjà éprouvée par ces problèmes d’organisation, ainsi que les nouveaux personnels qui peuvent arriver sur ces postes. »
L’impact sur la santé mentale des enseignants.
ENQUÊTE DU SYNLAB66 : LEVER LE TABOU SUR LA SANTÉ MENTALE DES ENSEIGNANTS
Cette enquête sur la santé mentale à l’école a été menée du 27 avril au 11 mai 2022 auprès de 1 056 enseignants sous la forme d’un questionnaire en ligne transmis via la plateforme ÊtrePROF et ses réseaux sociaux.
Elle fait ressortir l’importance du stress chez les élèves tout au long de leur parcours scolaire, mais aussi chez les enseignants :
- 38% des enseignants interrogés se sentent émotionnellement vidés par leur travail une fois par semaine au moins;
- plus de 80% des enseignants présentent un score faisant référence à un épuisement émotionnel moyen ou fort.

L’inspecteur général de l’éducation, du sport et de la recherche Christophe Marsollier ajoute : «Jamais la question du “prendre soin” n’a été aussi prégnante qu’aujourd’hui. Elle ne concerne pas uniquement les élèves : les résultats soulignent que les enseignants aussi sont exposés et qu’un nombre croissant a besoin de soutien et d’accompagnement.»
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Le rapport 2024 : morceaux choisis
– Le nombre de sollicitations a progressé à un rythme encore plus soutenu que les années précédentes (+ 16 % en un an, et + 50 % en 5 ans)
– Les saisines présentées par les personnels constituent 24 % du total des réclamations et poursuivent leur progression en volume
« Un sentiment d’essoufflement s’exprime parfois chez les agents, au sein même de l’administration comme dans les établissements, lié à l’effort considérable qu’ils ont dû fournir pour s’adapter aux réformes et aux transformations de leur environnement, et faire face à des crises multiples. La part des personnels qui a le plus augmenté est celle des non titulaires (+ 141 % depuis cinq ans), et en particulier celle des contractuels non enseignants (notamment les AESH), qui a crû deux fois plus vite que celle de tous les non-titulaires. »
– 35 % des saisines portent sur des questions financières : +127 % en cinq ans.
Une attention particulière doit être portée aux changements de responsables au sein des équipes (mutations, départs en retraite…) afin que soit mieux assurée la continuité du service. Certains retards sont en effet expliqués par le départ d’un agent référent, sans transmission effective des dossiers, ce qui accroit les risques d’oubli ou de blocage.
En cas d’erreur, en particulier sur la rémunération, des solutions devraient pouvoir être mises en oeuvre immédiatement. Or, à la décharge des gestionnaires, ils ne disposent pas toujours des informations ou de la capacité d’action nécessaires, alors qu’ils sont les premiers interlocuteurs des agents. Il est donc essentiel que les décisionnaires et les encadrants soient mobilisés rapidement pour garantir une réponse de qualité aux agents, notamment en cas d’incidents financiers.
Enfin, l’administration gagnerait à être totalement transparente lorsqu’une erreur est commise, qu’un budget fait défaut ou qu’un retard est inévitable (pour permettre à l’agent de prendre ses dispositions). Trop souvent, elle pratique l’évitement en ne lui répondant pas, ce qui crée incompréhension, anxiété et mécontentement.
– 17 % concernent le déroulement de carrière et les questions statutaires. Ces questions concentrent beaucoup d’amertume parce qu’elles mettent en jeu la transparence des décisions et surtout la reconnaissance de l’engagement et du travail des agents.
– 13 % ont trait aux affectations et mutations et révèlent souvent des situations familiales particulièrement difficiles (éloignement et séparation des familles), qui entravent le parcours professionnel des requérants.
– 12 % portent sur les relations professionnelles, entre pairs ou hiérarchiques : organisation et conditions de travail, présomption de harcèlement ou de discrimination… Ce domaine a augmenté de 55 % en cinq ans.
– 12 % des demandes concernent les questions de recrutement. Ces demandes repartent à la hausse (+ 25 %) après une baisse l’an dernier. Les réclamations des candidats aux concours ont augmenté de 6 % en un an. Mais ce sont les questions liées au recrutement et au renouvellement des contractuels qui représentent la part la plus importante (+ 40 % en un an).
– 8 % des saisines sont des sujets de protection sociale (arrêts liés à la maladie, prise en charge du handicap, allégement de service, invalidité).
–3 % des réclamations concernent les pensions et les retraites (validation, réversion) : + 20 % . Les demandes portent sur des situations souvent complexes, source d’une forte anxiété chez les réclamants, et elles nécessitent un traitement sur le temps long de la part des médiateurs l’administration ne délivre pas à ses interlocuteurs une explication claire et suffisante pour qu’ils puissent comprendre les raisons de la décision qui les concerne et mieux l’accepter.
Traitement : 57 % des réclamations sont estimées recevables et font l’objet d’une intervention du médiateur.
Après instruction de la réclamation, le médiateur a estimé qu’il se trouve en présence d’une erreur d’appréciation ou de gestion de l’administration ou bien d’une situation humaine particulièrement délicate. Lorsqu’il estime que la réclamation relève d’un dysfonctionnement de ce type, ou qu’un droit de la personne a été bafoué, le médiateur intervient auprès de l’autorité concernée pour demander un réexamen de la décision ou soutenir une modification de l’appréciation ou des pratiques. Le nombre de ces réclamations ayant fait l’objet d’une intervention du médiateur a augmenté de plus de 11 % en un an.
En 2024 : sur 9 500 réclamations soutenues par le médiateur, 79 % ont abouti à un succès partiel ou total.
FOCUS :
- L’accompagnement des transitions
Le ministère promeut, de longue date désormais, la diversification des profils et des parcours et entend l’accompagner, en particulier pour les enseignants.
Toutefois, les saisines de la médiation montrent que la mise en oeuvre de ces orientations sur le terrain rencontre encore des obstacles : un accompagnement insuffisant, voire parfois absent, des explications inexistantes ou incompréhensibles du fait de leur complexité, une difficulté à prendre en compte les enjeux individuels et les problèmes humains, jusqu’à, dans certains cas, décourager des vocations… Et ceux qui, dès lors, souhaitent quitter l’institution peuvent se heurter à de nouvelles complexités administratives.
- La promesse non tenue des ruptures conventionnelles
La médiation constate que le dispositif ne remplit pas toutes ses promesses et fait état de réclamations portant sur des refus non compris, des absences de réponses et des paiements d’indemnités qui tardent à être versées. Elle regrette par ailleurs que l’instruction des dossiers de rupture conventionnelle révèle trop souvent que les demandes sont motivées par une perte de sens au travail et une volonté de quitter notre institution, plutôt que par une démarche de reconversion construite sur l’expérience acquise.
Les réclamations conduisent à s’interroger sur les véritables raisons du refus : manque de crédits disponibles ? volonté de privilégier la démission ? traitement différencié selon que la demande de départ émane de l’agent ou de l’administration ? L’administration gagnerait sans conteste à être plus transparente dans les critères d’attribution.
- L’impact des accidents de la vie sur la carrière : une double peine ?
Malgré la volonté forte affichée par l’administration ces dernières années pour accompagner les personnels dans tous les actes RH et les progrès incontestables qui en ont résulté, les médiateurs observent que cet accompagnement est encore perfectible sur le terrain.
Cette situation est souvent plus marquée et plus dommageable encore pour les personnels qui connaissent une rupture dans leurs parcours, en particulier lorsqu’il s’agit d’une rupture subie sous la forme d’un arrêt long pour raison de santé, ou lorsque les personnels se trouvent en situation de handicap. La reprise d’activité peut alors s’avérer complexe, et/ou le déroulement de carrière se trouver fortement impacté ou limité, provoquant chez certains personnels un ressenti de « double peine »
