Le 15 septembre 2022 Patricia Colson SG du SNAMSPEN et Florence Dubonnet secrétaire nationale du Sgen-CFDT étaient reçues pendant 1 h30 par monsieur Nicolas Kanhonou, Conseiller école inclusive égalité entre les femmes et les hommes et lutte contre les discriminations. Compte-rendu.
Médecine scolaire : Les constats du Snamspen / Sgen-CFDT :
Le nombre de personnels médicaux toujours plus réduit dans l’éducation nationale
Un nombre de plus en plus restreint de personnels médicaux au sein de l’EN : retraite, démission, défaut d’attractivité, absence de sens au travail, burn out…
Médecine scolaire : une organisation du travail qui souffre
- D’une direction ne reconnaissant pas les missions de santé, et l’urgence de santé publique et préférant que des actes de réglementations sans valeur ajoutée pour l’élève soient réalisés : au détriment des visites de 6 ans, des diagnostics des troubles des apprentissages, des difficultés d’expression comportementale.
- Une absence d’organisation de travail coordonnée entre professionnels infirmiers, psychologue, AS et médecin : la notion d’équipe médico-psycho-sociale fait terriblement défaut au sein de l’EN.
- Des lieux non conformes à l’exercice médical et un défaut d’assistant médical pour chaque médecin (pas de réel CMS ).
- Une absence d’organigramme repérant les professionnels sur les bassins de vie, pour les usagers, pour les équipes et pour le sanitaire : des adressages sauvages et inefficaces vers le soin avec perte de chance pour l’enfant.
- Une absence d’outil ergonomique notamment de logiciel professionnel : alors que la pénurie sanitaire existe, pas de logiciel adapté aux partages des données de santé avec le médecin traitant, la PMI, l’hôpital : nous demandons l’accès au carnet de santé numérique, c’est l’intérêt suprême de l’enfant, de son parcours de santé et de sa protection.
- Pas de matériel , de temps ni d’espace dédiés à la concertation pluridisciplinaires à distance, qui pourraient aider les équipes, les familles.
- Pas de réelle politique de recrutement des médecins dans les rectorats : recrutement pour un plein temps 3400 euros brut mensuels par exemple, refus de temps partiels, contrats sur 10 mois…
Les demandes formulées par le Snamspen / Sgen-CFDT
- Retrouver un secteur d’activité défini sur un périmètre géographique bien circonscrit pour agir en toute connaissance du contexte scolaire et populationnelle, tel le cadre nécessaire et défini par notre circulaire pour exercer nos missions.
- Adresser un message fort pour que les IA DASEN ne fassent pas supporter aux médecins encore existants toutes les missions d’un département normalement effectuées avec des effectifs complets , et notamment des missions réglementaires sans valeurs ajoutées pour l’enfant.
- Privilégier les missions médicales des médecins de l’ EN dans l’intérêt de l’enfant et de la précocité nécessaire des diagnostics à réaliser.
- Ne plus avoir à réaliser les aptitudes pour les travaux réglementés pour les mineurs. Les lycées agricoles n’ont pas de médecins scolaires, et seulement des infirmières scolaires. Soumis à la même réglementation : le ministère a su mobiliser des médecins pour remplir cette mission réglementaire.
- Ne plus contresigner des PAI dès lors qu’il n’y a pas d’aménagement de la scolarité. Nous n’avons pas vocation à contrôler l’activité médicale de nos confrères généralistes ou spécialistes, mais à agir pour permettre un accueil et une scolarité adaptée en toute connaissance des établissements scolaires.
- Installer une équité de traitement des enfants et de leurs besoins : les médecins peinent à accepter de contribuer à renforcer les inégalités d’accès à la santé et à la réussite scolaire. Le traitement des demandes de PAP, de reconnaissance de handicap, et d’aménagement aux examens nous posent des problèmes éthiques et remet en cause le sens de notre travail :
- Inutilité d’interpeller les médecins scolaires juste avant les examens pour valider des aménagements pédagogiques qui sont déjà en place et actés
- Urgence de définir plus rigoureusement et communément ce qu’est un handicap pour les fonctionnements cognitifs différents et un cadre plus rigoureux et mieux connu de tous pour octroyer les PAP
- Proposition que le temps supplémentaire octroyé ne soit plus une décision médicale mais bien pédagogique. Ce temps en plus, est l’aménagement le plus fréquemment demandé dans les aménagements aux examens..
- Proposition de contribuer à la formations des personnels aux besoins éducatifs particuliers, à l’importance de la bienveillance et de la qualité de l’environnement scolaire, au respect de la vie privée des familles.
- Des lieux , moyens matériels et organisationnels ( équipes médico-psycho-sociales, accès au carnet de santé numérique ) pour mieux travailler et une reconnaissances des compétences qui se doit d’être autre chose qu’un conseil technique jugé optionnel par les directeurs et chefs d’établissement voire l’administration. Une articulation définie avec les PCO, les CMP, CMPP, IME…
- La secrétaire nationale du Sgen CFDT, ingénieure et en charge des systèmes numériques dans l’institution a fait remarquer l’impossibilité de satisfaire avec un seul outil les statistiques, le contrôle de l’activité des agents et un logiciel répondant pleinement aux besoins des agents pour leur activité (notamment note personnelle du médecin).
Les réponses du ministre délégué
Ce que nous a transmis le ministre délégué après l’exposé du SNAMSPEN et au cours du dialogue qui a suivi :
- Il dit « comprendre que l’on travaille pour l’administration et pas pour la santé des élèves ce qui est pourtant notre cœur de métier et nos aspirations »
- L’explosion des demandes de reconnaisse de handicap le soucie beaucoup, et s’explique par une non reconnaissance du dispositif PAP par les parents qui sont confrontés aux aménagements aléatoires.
- Constate que les aménagements des examens est un processus complexe où de l’injustice est ressentie ; les familles sont mal informées.
- Dit qu’il existe une demande des familles pour que scolarité et évaluation lors des examens bénéficient des mêmes mesures d’adaptation.
- Remarque que le défaut de suivi des PAP conduisent à des recours abusifs au statut MDPH.
- Se demande si l’avis du médecin scolaire est finalement nécessaire pour les PAP. Ce à quoi nous répondrons que tous les confrères ne sont pas formés aux troubles neurodéveloppementaux et qu’il est difficile pour le médecin de l’enfant de ne pas octroyer de PAP à une famille qui le demande. Quel respect de l’équité et de ce dispositif alors ? Quid de la réévaluation nécessaire, avec l’évolution neurodéveloppementale de l’enfant, des réels besoins en compensations et en adaptation des élèves, tant en moins qu’en plus ?
- Est en accord pour réfléchir sur l’aptitude aux travaux réglementés pour les mineurs, ce sujet est déjà sur la table, mais il faut travailler sur la réglementation.
- Informe que la DGRH travaille actuellement à améliorer les salaires des médecins.
- Comprend notre volonté de travailler pour l’éducation nationale, et laisse entendre qu’on est appelé à y rester. Que les représentants de la santé scolaire semblent faire des efforts pour travailler en équipe, mais qu’il existe des peurs ancestrales et historiques. Ce à quoi nous répondons, afin de contourner ces peurs, qu’il faudrait déjà 4 conseillers techniques départementaux (infirmier, médecin, AS, psychologue) à même de travailler de façon pleinement coordonnée pour impulser le travail d’équipe et les collaborations indispensables aux plus près des élèves.
- A entendu que si nous devons rester à l’EN, nous demandons la pleine reconnaissance de notre corps, de son rôle dans l’école inclusive, sur la santé mentale, sur la protection du bien-être de l’enfant : la formation spécifique des médecins de l’EN pour cela est importante ; qu’un statut interministériel est indispensable pour nous aider à faire respecter les missions de santé.
- Comprend qu’il faut effectivement revoir les missions des médecins mais dans un cadre à part entière et nécessite des débats et du dialogue.
- Questionne finalement sur la problématique du recrutement des médecins de l’ EN : la réponse faite pointe les salaires inadaptés par rapport au nombre d’années de formation, le sens des missions actuelles, et l’organisation du travail.
L’analyse du SNAMSPEN/Sgen CFDT suite à cette audience :
Nous avons apprécié le temps et la qualité d’écoute que nous a réservé le ministre déléguée à l’école inclusive sur le seul thème de la médecine scolaire durant une heure trente d’entretien.
L’urgence apparaît dans la redéfinition des missions des médecins de l’EN et de leurs conditions de travail dans un contexte de pénurie médicale et d’une meilleure mobilisation de leurs compétences médicales.
Médecine scolaire, les revendications du SNAMSPEN / Sgen-CFDT :
- Quel que soit l’employeur qui nous sera réservé au-delà des décisions politiques à venir ( en attente du rapport demandé par la loi 3DS) , nous nous destinons à la santé des élèves à leur réussite scolaire et à leur bien- être ( climat scolaire et familial ), source de santé mentale
- Nous revendiquons la reconnaissance de nos compétences en médecine scolaire , médecine contextuelle, imposant de bien connaître l’institution et sa réglementation, avec la prise en compte de tous les milieux de vie de l’enfant
- Nous revendiquons un exercice en pole médico-psycho-social bien défini, lisible, reconnu pour être une ressource dès lors qu’il existe une problématique durable en lien avec la scolarité et pour assurer la promotion de la santé de l’élève : nous désespérons de le voir naitre à l’EN, qu’il soit alors créé en dehors de l’ EN pour être mieux repéré et utilisé !
- Nous revendiquons une organisation de travail qui reconnaît la compétence de chaque professionnel (infirmière, psychologue, AS, CPE, enseignant, enseignant spécialisé, AESH, rééducateurs …) et l’apport de l’expertise de chacun pour la mobiliser de façon adaptée : ni adressage sauvage et inadapté dans le soin, ni perte de chance pour l’enfant, ni usurpation de rôle et de fonction: tous ensemble, mieux et plus efficace au service de l’enfant, des familles et des équipes éducatives!
- Nous revendiquons un nouveau statut pour les médecins de santé publique, notamment pour ceux au service de l’éducation nationale et de la PMI, revalorisé tant au niveau de compétences particulières reconnues qu’au niveau des salaires. Ce statut doit permettre la reconnaissance des médecins titulaires en poste, mais aussi l’attractivité des médecins contractuels en protégeant les uns et les autres d’un sentiment d’injustice et de négation du concours passé pour accéder à la formation contraignante et riche de compétences acquises à l’ EHESP.