Le 23 mai 2008, les secrétaires générales de la fédération Sgen-CFDT et du SNAMSPEN / Sgen-CFDT interpellaient le Ministre de l’Éducation Nationale. Malgré des propos qui devraient l’alerter sur la majoration des risques psychosociaux, toujours aucune réponse !
Lettre adressée au ministre de l’Éducation nationale :
Ministère de l’Éducation nationale
Monsieur Jean-Michel Blanquer
Ministre de l’Éducation nationale
110 rue de Grenelle
75357 Paris SP 07
Paris, le 23 mai 2018
Nos réf. : CNB/PC/BN/5240
Monsieur le ministre de l’Éducation nationale,
Médecins de l’éducation nationale, en charge de la santé et du bien être des élèves, nous sommes au regret de vous informer que l’exercice de nos missions, telles que définies dans la circulaire du 10 novembre 2015, est devenue impossible à réaliser dans les conditions actuelles.
Certains de notre aptitude à prioriser nos missions et contraints de respecter les priorités fixées par le cadre réglementaire de notre administration, nous ne pouvons plus faire face à l’ampleur des demandes d’actes et d’expertise.
En effet, l’article 28 de la loi 83-634 du 13/07/83 relative aux droits et devoirs des fonctionnaires fait obligation à tout fonctionnaire de se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique mais en raison de la pénurie de professionnels médicaux et en l’absence d’une politique de recrutement attractive et pérenne dans chaque académie, nous sommes de plus en plus débordés par des procédures veillant à l’exigence administrative plutôt qu’au respect des véritables besoins de santé qui devraient mobiliser notre expertise médicale et qui constituent le coeur de notre métier et de notre mission.
A cela s’ajoutent des secteurs de plus en plus étendus, sans aide pour certains médecins d’une secrétaire médicale, de moyens matériels et locaux adéquats. Il n’y a toujours aucune collaboration professionnelle organisée par notre ministère pour que chaque élève bénéficie de l’expertise la plus adaptée, par des professionnels de santé connaissant parfaitement le milieu scolaire. Durant toutes ces années, en l’absence d’organisation permettant une véritable collaboration des professionnels pour agir en prévention sur ce qui impacte la réussite scolaire, et sans plus de médecin scolaire désormais assurant cette prévention spécialisée, nous nous trouvons de plus en plus sollicités pour des élèves aux troubles installés, notamment en ce qui concerne les troubles du comportement dont certains sous-tendus par des diagnostics non faits.
Les modifications organisationnelles itératives, pour organiser la pénurie de moyens humains, auxquelles nous sommes soumis, sont toutes délétères quant à leur impact sur le sens de notre travail auprès des élèves. Elles nous placent dans un vrai conflit de valeurs sur lequel tous les médecins de l’institution attirent votre attention, source désormais d’un réel mal être au travail.
Monsieur le ministre, ni les médecins traitants débordés et non formés au milieu scolaire, ni les autres professionnels de l’Éducation nationale ne sont en mesure de faire les diagnostics médicaux que nous assurons encore chaque jour.
Ni le service sanitaire, ni l’adressage des problématiques à l’extérieur de l’école, restant sans prise en charge, ne nous semblent la bonne réponse ni aux besoins de l’école inclusive, visant la réussite de chaque enfant, ni à la pénurie galopante de médecins scolaires.
Les risques psychosociaux sont au maximum pour les médecins de votre ministère, dont plus de 95% sont des femmes, et que vous laissez travailler dans des conditions devenues inacceptables, malgré les alertes itératives relayées par de nombreux rapports et par des députés et sénateurs de votre majorité.
Monsieur le ministre, à la tête du ministère depuis plus d’un an, sommes-nous si peu importants à vos yeux pour qu’aucune réponse ne soit faite en urgence devant la dégradation devenue intolérable de nos conditions de travail ?
Nous n’attendons pas un groupe de travail mais une prise en compte urgente de cette nouvelle alarme :
- Nous demandons une réelle politique de recrutement de médecins comme cela existe avec succès dans quelques académies.
- Nous demandons à ce qu’une ligne budgétaire soit abondée par le ministère dans chaque académie et que ce budget soit strictement et effectivement consacré à assurer le recrutement et le salaire d’un nombre de médecins suffisant dans chaque département.
- Enfin, nous demandons, à nouveau, qu’une seule et unique circulaire centrée sur l’élève, son bienêtre et sa santé, puisse préciser le rôle et l’expertise de chaque professionnel pour apporter la réponse adaptée aux difficultés repérées impactant le bien être et la réussite de chaque élève et aux collaborations professionnelles indispensables pour ceci.
Monsieur le ministre, nous espérons une réponse adaptée – ce qui se comprend comme une mise en oeuvre de mesures concrètes et urgentes pour la rentrée prochaine – en faveur des médecins, personnels dont les conditions de travail sont depuis trop longtemps ignorées par nos responsables politiques, ce qui impacte la santé et la réussite des élèves les plus fragiles.
Nous vous prions de bien vouloir croire en l’expression de notre respectueuse considération et en notre profond engagement pour le service de promotion de la santé en faveur des élèves.
Catherine Nave-Bekhti
Secrétaire générale du Sgen-CFDT
Dr Patricia Colson
Secrétaire générale du SNAMSPEN/Sgen-CFDT
Pour aller plus loin :