Le Sgen-CFDT a été reçu par les membres du cabinet de Carole Grandjean afin de nous exposer un projet de modification de la classe de Terminale pour la rentrée 2024. Ce projet doit répondre à une priorité énoncée par le président de la République d’en faire « une année sur mesure ».
Objectifs de la refonte de l’année Terminale bac pro
Lors de deux audiences successives, les membres du cabinet nous ont présenté les objectifs d’un projet devant répondre à plusieurs critères : favoriser une meilleure insertion professionnelle ou une meilleure poursuite d’études tout en répondant à une exigence de renforcement des « savoirs fondamentaux ».
Nos interlocuteurs nous ont présenté le calendrier des échéances et la rapidité avec laquelle ce projet devait donc se discuter. L’entrée en vigueur est prévue dès la rentrée 2024.
Pour le Sgen-CFDT, de telles ambitions ne peuvent être portées dans des délais si contraints et avec de telles méthodes.
Réorganisation de l’année de terminale bac pro
Une alternance revisitée et certains enseignements renforcés
Le projet prévoit :
- des cours qui se dérouleraient de manière continue sans alternance avec des périodes de formation en entreprise (PFMP) entre septembre et mars
- la certification avancée pour la majeure partie des disciplines à la veille des congés de printemps,
- un renforcement dans les enseignements généraux en Mathématiques et Français, Histoire-Géographie et EMC. Ces renforcements ont pour but de mettre en place des groupes de besoins et des adaptations pédagogiques pour accompagner des profils d’élèves différents.
Le renforcement dans de nombreuses disciplines est à saluer. Mais, fixer avant la période des congés de printemps une partie des épreuves ponctuelles et des contrôles en cours de formation n’a pas de sens.
L’expérience en lycée général doit nous inviter à y réfléchir…
Par ailleurs, les moyens demeurant constants, cette proposition de renforcement des horaires fait disparaitre la co-intervention mise en place lors de la réforme précédente alors qu’elle commençait à porter ses fruits. Cette modalité pédagogique permettant de donner toujours plus de sens à la formation suivie et de renforcer le collectif.
Cela interroge également sur le devenir de certaines matières enseignées puisqu’elle implique de récupérer des heures d’enseignement et non d’en créer de nouvelles.
Dans ce contexte, nous ne cessons d’interroger le cabinet sur le détournement des heures complémentaires (CAP, 3PM, autres dispositifs). Ces heures, qui devaient depuis la réforme de la TVP permettre de dédoubler une majorité de cours, n’existent pas partout.
Pour le Sgen-CFDT faire fi de la sorte du travail des enseignant.es de lycée professionnel n’est pas acceptable. Changer sans arrêt les modalités pédagogiques sans les évaluer et bousculer les conditions de travail des personnels sans jamais en mesurer les effets ne peut demeurer la règle.
Un calendrier des P.F.M.P. et de la fin de l’année difficilement carrossable
Les PFMP obligatoires seraient positionnées à la suite des épreuves ponctuelles et des contrôles en cours de formation (CCF) et réduites à 6 semaines.
Mi-Mai, à l’issue de cette première période de PFMP obligatoire, les élèves se verraient proposer un parcours différencié. Ils pourraient choisir de réaliser 6 semaines de PFMP en vue d’une insertion professionnelle ou un module de préparation à la poursuite d’étude.
Le module dédié à l’Insertion professionnelle consisterait dans la possibilité de renouveler de 6 semaines les PFMP.
Le statut de ces PFMP reste très flou. Quel cadre et quelles missions sont attendues pour les enseignant.es qui en assureraient le suivi ?
Par ailleurs, augmenter ces périodes de PFMP dans la période de mi-mai à juillet dans certains territoires va être très complexe, car elles vont se trouver percutées avec celles d’autres niveaux ou avec la nouvelle mesure des stages de seconde en lycée GT.
Le module de poursuite d’étude serait centré sur une préparation au BTS et composé :
- au 2/3 de cours visant à la consolidation d’enseignement généraux et de pratiques professionnelles et de méthodologie
- pour 1/3 à l’acquisition de compétences psychosociales
Les enseignant.es qui assureront ce module n’ont aucune visibilité sur les volumes et les contenus attendus.
Pour le Sgen-CFDT, il n’est pas concevable de changer la nature des enseignements et des missions sans les personnels et sans un cahier des charges précis.
Nécessité de temps et un dialogue social conséquent
Certains éléments pourraient nous convenir : La modularité des enseignements et des modalités pédagogiques adaptées. Ces revendications de longue date du Sgen-CFDT permettraient d’accompagner et de sécuriser au mieux les parcours des élèves. Mais la proposition de réforme systémique de l’année de Terminale bac pro ne peut y répondre.
Aussi, le Sgen-CFDT demande une année moratoire. Il faut se donner les moyens de parvenir à relever les nombreux défis de la classe de terminale. Le premier défi concerne la réussite des élèves par des conditions d’enseignement améliorées.
D’autant que dans la même période s’effectue également une redéfinition de la carte des formations. Celle-ci est loin de répondre aux exigences d’offres de formations riches et adaptées au tissu économique dans l’ensemble des territoires. Les discussions en régions sur d’éventuelles fermetures se basent seulement sur les effectifs par classe. Elle ne tiennent pas compte de réelles projections sur les besoins du territoire.
Pour le Sgen-CFDT ces cartes des formations ne peuvent s’élaborer sans l’expertise des équipes des établissements concernés.
Pour le Sgen-CFDT, il est impossible d’envisager la réforme de la classe de terminale en même temps qu’une transformation de la carte des formations. Celle-ci risque de fragiliser l’ensemble des agents de nos établissements. En effet, rien de sérieux n’est envisagé pour accompagner nos collègues dans une éventuelle reconversion. Tout va se réaliser de façon précipitée.
Rappelons que pour la refonte de la carte des formations, la ministre Grandjean nous a présenté “une méthode” qui devait ouvrir un dialogue social avec l’ensemble des partenaires. Ceci consisterait, avant toute fermeture, à mener une réflexion sur les raisons de la non attractivité d’une section et de ses difficultés d’insertion. La certitude à ce jour, c’est que soit de nombreux recteurs ne comprennent pas le langage Grandjean, soit ce sont de simples intentions verbales…
Le Sgen-CFDT a rappelé au ministère que la voie professionnelle ne concerne pas que les Bac Pro. Les CAP ne doivent pas être laissés de côté.