Alors que les évaluations d’établissements du second degré se mettent en place dans un contexte très perturbé, le Conseil d’évaluation de l’École a décidé d'étendre le dispositif au premier degré, dans un premier temps pour des écoles volontaires avant une généralisation prochaine.
Pour le Sgen-CFDT, sortir de l’évaluation individuelle pour passer sur à une conception collective et partagée est une bonne chose à condition de ne pas vouloir reproduire le modèle second degré pour les écoles.
La France est en effet l’un des derniers pays dans le monde à ne faire qu’une évaluation individuelle via l’entretien de carrière et à ne pas avoir installé une évaluation collective basée sur des objectifs choisis. Dans cet objectif, le Ministère a installé le Conseil d’évaluation de l’école pour définir les modalités que cette évaluation d’École pourrait revêtir.
Que penser d’un tel dispositif pour le premier degré ?
Pour le Sgen-CFDT, dans une période où les préoccupations des personnels sont entièrement tournées vers les conséquences de la pandémie et l’application de protocoles, la mise en œuvre de ce dispositif n’est pas opportune.
Concrètement, l’évaluation d’école, c’est quoi ?
L’objectif affiché est de veiller à la cohérence des politiques publiques d’éducation au sein d’un territoire.
Avec comme objectif central la réussite des élèves, il vient interroger la capacité évaluative des différents acteurs de l’École mais aussi le pouvoir d’agir de la communauté éducative (enseignants, personnels de la collectivités territoriale, familles).
La procédure d’évaluation se déroule en deux temps :
- Un temps d’auto-évaluation :
Il s’agit que chaque acteur puisse donner son analyse de l’école dans un objectif prospectif autour par exemple : du climat scolaire, des relations entre les acteurs, des difficultés des élèves ou de la place du projet.
Si cela concerne bien-sûr les temps d’apprentissages en classe à travers ce que les élèves ont acquis, cette autoévaluation intègre aussi les temps de vie de l’enfant dans l’école (scolaires et périscolaires).
Participent à cette phase d’autoévaluation les enseignants, les parents et les membres de la collectivité territoriale.
- Un temps d’évaluation externe :
une équipe pluriprofessionnelle nommée par le DASEN sera chargée de conduire ce temps en vue de produire un rapport d’évaluation à destination des acteurs de l’école.
Les membres qui formeront cette équipe d’évaluation (IEN, CPC, Directeur, Directrice…) ne doivent en aucun cas intervenir habituellement dans l’école évaluée.
L’objectif est d’avoir un regard externe complémentaire et neutre sur ce qui se passe. Ce rapport sera donc basé sur l’analyse des autoévaluations et fera aussi l’objet de rencontres avec les acteurs afin de cerner les marges de progression possibles et les objectifs que les membres de la communauté éducative pourraient se fixer à l’issue de cette évaluation.
Créer du collectif et mieux construire le parcours des élèves
L’objectif de cette procédure d’évaluation d’école est de créer du collectif au sein des écoles.
L’une des hypothèses du Conseil de l’Évaluation de l’École est que l’école fonctionne en silos et manque de collectif notamment pour la prise en compte global de l’enfant, de l’élève.
Moins juxtaposer, coordonner davantage les actions, croiser les regards devraient contribuer à la construction d’objectifs partagés.
Car l’évaluation ne doit pas rester un document rangé dans un tiroir, elle doit permettre aux acteurs de construire des orientations dans le respect de la professionnalité de chacun et des réalités d’un territoire donné. Le projet d’école pourrait ainsi prendre tout son sens.
Une nécessité : remettre cette évaluation des écoles à plus tard
Si la procédure d’évaluation d’école envisagée est intéressante notamment pour favoriser une fonctionnement plus collectif des écoles et donner un véritable sens aux projets d’école, c’est bien la période qui pose question.
La pandémie n’en finit pas et les enseignants sont fatigués par la gestion quotidienne des conséquences de la crise sanitaire.
L’’adaptation permanente des apprentissages aux enfants présents, le manque de remplaçants ou encore l’arrivée de contractuels ou de listes complémentaires bouleversent le fonctionnement pédagogique des écoles.
Pour le Sgen-CFDT, il faut différer la mise en œuvre de ces évaluations d’école car les équipes pédagogiques sont top déstabilisées pour s’approprier et mettre à profit un dispositif nouveau qui leur demande de porter un regard collectif sur leur travail.
Comment mieux généraliser ces expérimentations ?
Après une première phase expérimentale, le dispositif devait être adapté avant d’être étendu à l’ensemble des écoles à la rentrée prochaine.
Auditionné par le Conseil d’évaluation de l’École, le Sgen-CFDT a demandé à ce que l’année 2022-2023, soit une nouvelle année d’expérimentation avant que soit envisagée une généralisation.
Pour qu’il soit compris et utile, la montée en charge du dispositif doit être progressive et s’accompagner d’une formation de tous les acteurs.
Pourquoi ne pas commencer par tester le dispositif dans une école volontaire dans chaque circonscription afin d’évaluer la capacité des équipes pédagogiques et évaluatrices à s’approprier la démarche ?
Une appropriation par les acteurs est indispensable !
Le passage d’une logique traditionnellement fondée sur l’évaluation individuelle à une logique d’évaluation collective est une mini révolution.
Ce dispositif ne pourra être compris, accepté et utile aux équipes comme aux élèves que si l’on associe tous les acteurs à la phase de conception.
Pour le Sgen-CFDT, cette évaluation n’a d’intérêt que si elle est fondée sur une logique nouvelle d’accompagnement des équipes pédagogiques.
Si ce travail ne repose pas sur la confiance, si les conditions de sa mise en œuvre repose sur l’injonction et le contrôle, il perdra tout son intérêt et sera uniquement perçu comme une nouvelle contrainte. Celles et ceux qui assurent le pilotage de cette mise en œuvre doivent en être conscients et rompre avec la logique de verticalité qui prédomine encore trop souvent dans la relation entre IEN et équipes d’école.
Pour le Sgen-CFDT, engager cette expérimentation dans l’urgence, dans un contexte qui oblige tous les personnels des écoles à faire face à des difficultés inédites n’aurait pas de sens.